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La Noce, 2000

Publié le 22 Février 2014 par Rodrigue Trano

La Noce, 2000

Note: 9/10

Réalisateur: Pavel Lounguine

Genre: Comédie dramatique

Dans une petite ville de province en Russie, Tanya, une fille du pays partie à Moscou pour devenir top model, fait son retour et se décide à épouser son amour d'enfance, Michka. La noce s'organise..

Tout d'abord, il faut savoir que "La Noce" est un film quasi-introuvable, si ce n'est sur quelques DVD dézonés parfois trouvables sur des sites de vente en ligne. Sa valeur n'en est donc que renforcée !

Car en effet, cette pépite signée Pavel Lounguine est un pur chef d’œuvre. Méconnu en France, alors qu'il possède la double nationalité russe et française, le réalisateur de "Un nouveau russe" et "Taxi blues", n'en livre pas moins un film doué d'une profondeur incomparable. Si ce dernier est une comédie dramatique, avec ce que cela suppose en termes de mise en scène et de rebondissements scénaristiques, on ne peut se départir d'une impression de quasi-documentaire. Cette impression est le fait de plusieurs éléments. La façon de filmer, tout d'abord, caméra à l'épaule. Le recours à des acteurs mais aussi à des figurants méconnus (pour les seconds rôles) renforce cette impression. En suivant les déambulations de la caméra, on se sent comme plongé dans la Russie profonde, qui constitue le troisième élément de ce sentiment de documentaire: nous n'avons pas là la vitrine moscovite pour décor. Non, nous sommes dans une ville de province, au milieu de sa population cosmopolite.

La richesse du film est principalement le fait de son interprétation. Au-delà des deux amants, interprétés par Marat Basharov et Maria Mironova, le film se compose d'une myriade de comédiens de tous âges, de toutes classes sociales, véritable fresque de la société russe après une décennie de post-communisme. On y retrouve pèle-mêle l'oligarque arrogant, le flic véreux et corrompu, le voyou alcoolique mais loyal, le père pingre, l'ancien combattant, etc. Cette richesse d'interprétations semble même parfois voler la vedette à l'intrigue principale du film, à savoir la romance entre les deux amants!

Deuxième richesse du film: la profondeur et la sincérité des sentiments. A la différence des comédies romantiques occidentales, "La Noce" fait l'impasse (culturelle et incontournable) sur le strass et les paillette. Tout est ici mis à nu (au sens propre comme au sens figuré) du fait de la condition sociale des protagonistes et de leurs familles. La fête succédant au mariage est le fruit de mille petits arrangements et autres magouilles entres amis. La scène des mineurs, collègues de Michka, se cotisant pour que ce dernier puisse offrir une noce décente à sa future épouse est, à ce titre, émouvante. Le rapport à l'argent est ici totalement bouleversé. Il ne s'agit plus de s'acheter une énième bouteille de vodka ( sauf pour l'ami de Michka, et avec son argent), mais d'organiser un évènement solennel. Par la perte de cet argent, pour les motifs les plus divers, le film nous montre qu'au-delà des impératifs pécuniers, la vraie richesse est celle des sentiments: amitié, fraternité, camaraderie, solidarité, amour. Cette thématique atteint son climax lorsque les amants décident de quitter la fête pour aller récupérer l'enfant de Tanya dans un orphelinat en side-car. Lorsque ceux-ci reviennent en ville avec l'enfant, Michka déclare "C'est mon fils!" et tout le monde le croît malgré le caractère irréaliste de la chose. Pourquoi? Parce que son visage respire la sincérité et la joie, deux sentiments profonds et indissociables.

"La Noce" est un de ces films inclassables, véritable électrochoc cinématographique sans surenchère graphique où la beauté réside justement dans le dépouillement sincère émanant de ce dernier. Une comédie humaine profonde où l'Homme constitue le moteur de l'intrigue et occupe l'espace filmé en permanence. Une présence par ailleurs récompensée par un "Prix d'interprétation pour l'ensemble des acteurs" à Cannes en 2000.

Un film à voir absolument et qui entre, à titre personnel, dans mon top 10 aisément.

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